mercredi, 5 septembre 2007

Dossier important partie 1

Introduction
Je voudrais remercier le Groupe Fraternité Matin de nous inviter pour la seconde fois. Je pense que c’est une marque de considération que je voudrais retourner à ce groupe. A travers ce groupe, je voudrais saluer les journalistes qui sont nombreux dans la salle.
Pour ma part, parler devant le Groupe Fraternité Matin, c’est un honneur. Parce que d’abord, c’est le premier groupe de presse en Côte d’Ivoire, ensuite, c’est le plus vieux. Par ailleurs, c’est le premier Groupe au vu des chiffres qui nous sont communiqués et de l’interêt qui est porté à ce journal.
Je voudrais dire que je suis à votre disposition. Je répondrai avec franchise à toutes les questions franches que vous allez me poser. Il n’y a pas de sujet tabou. Je suis pour le choc des contraires. Je suis pour le choc des idées. Je ne suis pas pour l’unanimisme. Je veux qu’on parle bien. Qu’on ne pose pas une question pour faire plaisir à quelqu’un. Mais qu’on pose des questions qu’on pense être d’interêt national.
Je souhaite que le débat soit direct. Comme on est à une période où tout est direct. Je suis entièrement à vous. Faites de moi ce que vous voulez. Que le débat soit convivial.

Flamme de la paix
Je pense qu’aller à Bouaké, on peut en parler aujourd’hui, aisément. Mais avant la cérémonie qui a permis à tous les Ivoiriens d’y aller, le 30 juillet, ce n’était pas un exercice facile. C’est pourquoi, avant notre arrivée à Bouaké, le 9 juin, je n’ai pas voulu faire de polémique sur cet acte, parce que je savais ce que je voulais.
Et ce que je voulais, c’était de faire en sorte que les jeunes de Côte d’Ivoire, toutes ethnies confondues, toutes positions régionales confondues puissent se retrouver. Je pense que quand on se fait applaudir dans les stades, à des places publiques, où des millions de personnes viennent, on a un rôle historique à jouer.
Parce que quand les gens vous applaudissent, ça veut dire qu’ils espèrent en retour quelque chose de vous. C’est là qu’intervient la responsabilité. Et, dans ce pays, il y a divers degrés de responsabilité.
Moi, j’ai décidé de jouer ma partition. Au soir de ma vie, on ne me demandera pas combien de polémiques j’ai faites avec des gens. On me demandera ce que j’ai fait pour mon pays.
Je voulais aller à Bouaké. Et vous avez constaté que j’y étais le 9 juin. C’est l’essentiel.

Stratégie pour la Flamme

J’ai pris les contacts que j’estimais utiles. J’ai employé le langage que j’estimais utile et je pense que le 9 juin, les images ont parlé. Nous étions à Bouaké dans une ferveur. Et la suite, vous la connaissez. Aujourd’hui, je pense que l’on se côtoie, on se parle.
Par la suite, quand je suis reparti à Bouaké, je ne dormais pas ailleurs. Je dormais chez Wattao. Il y a un an, six mois, personne ne pouvait l’imaginer. C’est mon rôle, personne ne me l’a assigné, je me suis l’assigné moi-même.
Je pouvais faire comme tout le monde. Aller à Bouaké, puis vers 14 heures, ressortir et venir dormir à Yamoussoukro. J’ai plutôt décidé de dormir à Bouaké. J’ai décidé de dormir chez Wattao. C’est un acte pour rassurer tout le monde.

Caravane de la paix

Je n’ai pas entamé la Caravane de la paix parce que je voulais me comporter en touriste et faire le tour de toute la Côte d’Ivoire. Il y avait un objectif à atteindre. J’ai estimé que les pancartes qu’on vous collait à Abidjan ne signifiaient rien.
J’ai estimé que tous les fonds qui étaient engloutis dans des campagnes audio-visuelles et de communication n’apportaient rien. C’était plutôt de l’argent qu’on injectait et qui revenait à ceux qui l’injectaient. C’est cela la vérité.
La situation politique s’est crispée de jour en jour. Je me suis dit que si du 2 octobre 2002 jusqu’en 2005, nous avons réussi à faire sortir ces milliers d’Ivoiriens, cela veut dire qu’ils nous écoutent. Il faut qu’on leur parle au-delà des panneaux publicitaires, des campagnes de télévision et de presse. Il fallait aller sur le terrain. Comme nous avons des amitiés, nous les avons utilisées pour travailler.
J’étais à Anyama, à Abobo nuitamment pour parler avec des gens. Cela n’a pas été facile au début. Une situation qui a été crispée pendant cinq ans ne peut être changée d’un coup de baguette magique. Même les jeunes avec qui je parlais m’ont dit que ce n’était pas facile.
Je leur dis que c’est parce que ce n’est pas facile que c’est intéressant. Ce qui est facile n’a pas de valeur à mes yeux. Et donc c’est comme ça que nous avons commencé la Caravane de la paix. D’abord dans la partie gouvernementale. Et la question que vous me posez, a été posée.
«Vous tournez dans la zone gouvernementale, quand est-ce que vous irez à Bouaké ?» Je leur ai dit, à défaut d’être une lune pour éclairer la terre, il faut être d’abord une lampe pour éclairer votre maison.
La Caravane de la paix avait donc pour objectif de rapprocher ces jeunes. Nous les avons rapprochés. Donc, aujourd’hui, aller à Man, Korhogo, c’est un exercice facile. Moi, je n’aime pas ce qui est facile.
Plus de Caravane de la paix. Je ne vois pas pourquoi faire une caravane actuellement, ça n’a pas de sens. Nous avons convaincu ceux qu’il fallait convaincre. Nous avons été nous même à Bouaké.
Nous avons été dans les villages à Bouaké. Ceux qui sont à Bouaké viennent à Abidjan. Aujourd’hui, la situation, plus ou moins, n’est plus celle qu’on avait l’habitude de vivre.
C’est un premier objectif que nous avons atteint. Si j’ai une caravane à faire aujourd’hui, c’est d’aller dire, peut-être, merci aux Ivoiriens d’avoir accepté de faire la paix. Je ne parle pas de leaders politiques parce que, on sait ce que veut dire pour eux la paix.
Je parle de la masse ivoirienne. Je parle donc des Ivoiriens. Des gens de Bromakoté, de Katiola, de Massala. Je pense qu’aujourd’hui, plus ou moins, ça va. Donc, je n’ai plus besoin d’une caravane. Ce serait une caravane de trop. Et puis, il y a eu trop de caravanes. Moi, je n’aime pas ce que tout le monde fait.
Pour les leaders politiques, la paix veut dire ôtes-toi de là pour que je m’y mette. Quand eux ils sont au pouvoir, c’est ce qui est la paix.

Chefs religieux

J’ai été dans les mosquées, dans les églises. Je me suis dit à un moment donné que chacun avait quelque chose à dire. Il fallait permettre aux uns et autres de parler. Donc, nous avons fait presque du porte-à-porte. Nous avons été dans des maisons, dans des fours. Nous sommes allés à la rencontre des victimes. J’ai été à Néko, pour rencontrer la mère de Boga Doudou. C’est un aspect à relever.
Et, je ne suis pas allé à Néko seul. J’y étais nuitamment d’abord et le lendemain, j’y ai emmené Lida Kouassi qui était accusé dans ce pays d’avoir tué Boga Doudou.
La Caravane de la paix, c’était aussi cela. Rapprocher les positions. Faire disparaître la rumeur pour que l’information vraie puisse être donnée. Et j’ai été heureux que le ministre Lida Kouassi ait été accueilli dans la ferveur populaire. Pour nous, c’était important.
D’ailleurs, à ce sujet, nous repartirons bientôt à Néko, pour que avec tous les autres villages environnants, on fête cet événement. J’ai reçu, il n’y a pas longtemps, une délégation de ce village. Cela dit, j’ai été à Gnaliépa rencontrer la mère du Président de la République. J’ai été à l’ouest de la Côte d’Ivoire et je peux dire que cette partie du pays m’a marqué. Vous connaissez l’histoire de la petite Prisca qui est de Djelé, un village entre Bloléquin et Toulepleu, à quatre kilomètres de Toulepleu.
C’est là que la route m’a été barrée. Et on m’a présenté cette fille qui n’était plus une personne humaine. J’ai dit au docteur N’Cho qui était avec nous d’aller voir s’il y avait quelque chose à faire pour elle. Il a dit qu’on pouvait la sauver.
Aujourd’hui, elle a retrouvé le sourire. Je vais bientôt la raccompagner dans son village. Tout cela était important. J’ai été à Pantroquin où j’ai vu des gens avec des bras coupés. Une femme à qui on a dit «ou bien je tue ton enfant ou tu acceptes qu’on te coupe au moins un bras». Elle a tendu son bras qu’ils ont coupé. Il fallait donc faire parler toutes les victimes.
J’ai été dans un camp où des Bourkinabè ont été expropriés de leurs plantations. Je les ai rencontrés aussi pour parler avec eux.
J’ai dit à toutes ces victimes que leur pardon sera le ciment de la paix. Si vous qui avez perdu des parents, vous devant qui ils ont égorgé vos papas et mamans, si vous acceptez de pardonner, la paix va revenir en Côte d’Ivoire.
A Bouaké, pendant mon meeting, j’ai vu des gens qui pleuraient. J’ai vu des femmes qui versaient des larmes. J’ai donc compris que rien de fondamental ne nous divisait. Cette partie là aussi m’a marqué. J’ai compris en ce moment là ce que les Ivoiriens voulaient.

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